Extrait du livre Le nouveau guide du bonheur. De la «crise» du mitan à celle de la retraite
Par Marie-Paule Dessaint, docteure en sciences de l’éducation, consultante, auteure, biographe
Sept grands piliers du bonheur
Je n’avais jamais pensé à relier ma soixantaine au mitan de la vie, mais lorsque je repense à mes 40 ans, où tout en effet a commencé à être sérieusement chamboulé dans ma vie, je me rends compte que certains de mes questionnements actuels rejoignent ceux que j’ai eus à cette période, sans en tenir compte. Je pensais que tout allait s’arranger naturellement si je ne m’y attardais pas. J’avais trop d’autres choses plus importantes à faire. Alice, 61 ans
Voilà plus de quarante ans que j’anime des ateliers et des conférences sur les grandes transitions de l’existence, dont la crise du milieu de la vie, le mitan, entre 45 et 60 ans environ, et la préparation à la retraite.
Avec le temps, j’ai réalisé que si la crise du mitan n’a pas été résolue, elle risque d’en induire une autre plus intense encore lors du passage à la retraite.
Une crise, ce n’est pas une petite fin du monde personnelle.
C’est plutôt une occasion de croissance, une proposition de la vie, une opportunité dont il faut profiter au maximum pour connaître du bien-être et du bonheur en plus.
Je le dis souvent, la retraite n’est jamais l’aboutissement heureux d’une vie qui ne l’était pas suffisamment, surtout si l’équilibre entre ses piliers est devenu bancal, parfois au seul profit de celui du travail
Il faut y réfléchir bien à l’avance, et agir, même si, à juste titre, nous devrions être satisfaits de ce que nous avons accompli et ce que nous sommes devenus.
C’est au mitan que les questions existentielles commencent à fuser plus intensément
On s’interroge sur nos choix de vie passés et actuels et sur ce qu’il est peut-être temps encore de réajuster, de consolider ou carrément de recommencer.
Suis-je heureux ? Bien entouré ? Ai-je encore le temps de donner vie à mes rêves mis en veilleuse ? De rattraper les occasions perdues ? Quels sont mes besoins ? De quoi devrais-je me délester en priorité ou, au contraire, maintenir bien en vie ? Comment vais-je vieillir ? Mon travail me convient-il encore ? Mes parents resteront-ils autonomes ou auront-ils besoin de moi ? Et mes enfants, comment vont-ils s’en sortir dans ce monde devenu si difficile et parfois si hostile ?
Au mitan, la majorité des quarantenaires-cinquantenaires sont bien installés dans la vie avec leurs petits et grands bonheurs et leurs petits et grands malheurs.
Ils profitent des efforts qu’ils ont déployés pendant toutes ces décennies pour se tailler une place au soleil, atteindre leurs ambitions professionnelles et matérielles et, pour la majorité d’entre eux, fonder une famille.
Ils savent qu’ils ont fait de leur mieux, et bien plus encore, pour atteindre cette stabilité, parfois une façade, en se conformant aux standards du succès et de la réussite, en plus de tenter de satisfaire tout le monde autour d’eux : leurs parents, leurs employeurs, leur famille étendue, leur conjoint, leurs enfants, leurs relations, le voisin gonflable…
Ils sont nombreux à s’interroger sur l’étendue des sacrifices et des renoncements qu’ils ont consentis pour en arriver là, notamment des besoins, des désirs, des projets et des rêves.
Parfois, ils ont tout investi dans leur travail, au détriment de leur santé et de leur famille.
En 2022, 38 % à 40 % des travailleurs âgés de 35 à 49 ans ressentaient beaucoup de pression au travail au point d’éprouver des difficultés à gérer leurs tâches domestiques (statcan.gc.ca)
Les quarantenaires-cinquantenaires se demandent alors ce qui les a poussés à s’oublier ainsi en chemin et comment ils pourraient accorder plus de place à leurs propres besoins et à leur propre bien-être.
Ils s’inquiètent aussi à propos de leur avenir professionnel alors qu’on commence à les trouver trop âgés pour certains postes, même s’ils sont en plein au sommet de leurs compétences et de leurs expériences et ont beaucoup à offrir et à transmettre encore.
Cependant, ils observent aussi les effets du temps sur leur physique, sur leur santé ainsi que sur leur capacité de plaire et de séduire encore.
Ce temps qui file à toute allure voit poindre à l’horizon la finitude de leur propre vie et de celle des gens auxquels ils tiennent le plus, mais qui disparaissent peu à peu.
S’ils ne l’ont pas fait avant, ils s’interrogent sur le sens de leur vie ; leur mission de vie.
À quoi et pour qui ma vie aura-t-elle servi ?
Alors, ils déposent dans la balance leurs bons coups et leurs moins bons coups, leurs réussites et leurs échecs ainsi que les plus et les moins de leurs relations affectives et sociales.
Cela pourra les attrister ou au contraire leur confirmer qu’ils ont bien mené leur vie jusqu’à présent et qu’ils peuvent être fiers de ce qu’ils sont devenus.
Les quarantenaires-cinquantenaires s’ennuient parfois dans le confort de leur quotidien et de leurs habitudes sécurisantes alors qu’ils n’ont pas grand-chose de nouveau, d’emballant et même d’excitant en vue, tant au travail que dans leur vie de couple ou dans leurs loisirs.
Ils voient le peu de temps qu’il leur reste pour rattraper les occasions perdues ou pour tout recommencer.
Ils se demandent parfois aussi s’ils ne se sont pas carrément fait avoir par la vie et par ses paillettes ; un peu ou beaucoup trop.
Cette puissante prise de conscience poussera plusieurs à réaménager leur vie, juste ce qu’il faut pour rétablir l’équilibre entre leurs propres besoins et les attentes de l’extérieur, alors que d’autres vont la chambouler totalement, pour le meilleur, ou pour le pire.
Plusieurs retourneront aux études, prendront une année sabbatique, quitteront leur emploi pour créer leur propre entreprise ou pour faire le tour du monde, à pied, à vélo ou en voilier.
D’autres vont acquérir une minimaison, s’engager dans des actions bénévoles à l’étranger, former une nouvelle union et mettre des enfants au monde ou en adopter.
D’autres encore continueront sans rien changer, puisqu’ils ne s’imaginent pas être quelqu’un de différent. Ils ne ressentent pas du tout le besoin de cacher qui ils sont vraiment, car cette crise du milieu de la vie ne les atteint pas.
Non seulement leur personnalité et leur histoire de vie ne les y prédisposent pas, mais ils ont surtout su équilibrer toutes leurs sources de bien-être.
Enfin, il y a ceux qui n’ont pas le temps ni l’envie d’y penser tant ils sont pris dans le tourbillon et les exigences de leur vie, de leurs plaisirs et de tout ce qu’il y a à faire d’intéressant et d’amusant, ici et maintenant, même si, en chemin, ils subissent quelques turbulences et quelques accrochages.
Il ne leur reste que peu de temps et de place pour l’introspection et l’évaluation de l’impact que pourraient avoir leurs décisions d’aujourd’hui sur leur vie de demain.
Le témoignage d’Alice, au début de ce chapitre, illustre bien à quel point nous sommes nombreux à penser et à agir à courte vue en plus de tenir pour acquis tout ce que nous possédons, tant notre santé, que notre emploi, nos sources de revenus, de même que l’amour, l’affection et l’amitié de nos proches.
À suivre…
Voici l’introduction du livre Le nouveau guide du bonheur. De la crise du mitan à celle de la retraite. Sept grands piliers en équilibre
Le nouveau guide du bonheur. De la crise du mitan à celle de la retraite