Comment réagir et agir lorsqu’une personne de notre entourage arrive en fin de vie
Par Marie-Paule Dessaint, docteure en sciences de l’éducation, auteure, conférencière, consultante et biographe
La maladie, le vieillissement, la mort sont des états extrêmement intimes. Que pourrait-il y avoir qui soit plus proche de notre personne? Pourtant nous tendons à les écarter, comme s’il s’agissait d’événements étrangers à nous et non de faits les plus fondamentaux de notre vie. Naturellement, nous n’y parvenons pas. Larry Rosenberg, auteur de Vivre, à la lumière de la mort, de la vieillesse et de la maladie
Je vous propose quelques extraits du 25e point de repère (p. 322 à 324) de mon livre Cap sur la retraite. 25 points de repère pour franchir les transitions (Flammarion Québec, 2020).
Je crois que chacun de nous souhaite un peu, et même beaucoup, ce que j’y ai écrit lorsqu’il se préparera pour son tout dernier voyage.
Mais il y a souvent une longue distance entre les désirs et les besoins et la réalité.
Il manque notamment de ressources pour assurer les soins à domicile, les formations en soins palliatifs.
Il manque aussi cruellement d’intérêt pour cette question de fin de vie…
La mort intime. Ceux qui vont mourir nous apprennent à vivre
Comment mourir? Nous vivons dans un monde que la question effraie et qui s’en détourne. Marie de Hennezel
Je viens de relire La mort intime (2007) de la psychologue clinicienne Marie de Hennezel, qui, autrefois, a travaillé pendant plus de 10 ans dans un service de soins palliatifs. J’y ai recensé les principaux souhaits des personnes en fin de vie.
Je tire également ces desiderata de fin de vie
– de l’ouvrage de Larry Rosenberg Vivre, à la lumière de la mort, de la vieillesse et de la maladie (2004)
– et de cet article d’Yves Sciama Soins palliatifs: la vie malgré la mort, dans le magazine Science et vie, 2009 (mis à jour 2018)
Ces publications ne sont pas récentes, mais elles sont criantes d’actualité et d’humanité.
Et je n’en ai pas encore trouvé de plus récentes.
– J’ai également consulté plusieurs sites Web plus récents consacrés à ce sujet.
Je vous propose donc ici une synthèse de mes recherches et de mes écrits sur les besoins des personnes en fin de vie
1. Lorsque la personne apprend qu’elle est condamnée
– Ne pas sous-estimer sa capacité de faire face à la situation.
– Éviter les paroles faussement consolatrices, ne pas lui donner de faux espoirs.
– Lui laisser le temps d’encaisser la nouvelle. Se taire tout en étant présent.
– La laisser parler de son état et de sa vision de sa mort prochaine.
– Lui permettre d’exprimer librement ses peurs, et même ses regrets et sa révolte.
– La laisser pleurer, et ne pas hésiter à en faire autant avec elle.
– Accepter les silences, ne pas chercher à les combler coûte que coûte.
– Ne pas mentir sur son état, ne pas faire semblant que tout va bien et qu’elle va guérir.
– L’écouter attentivement quand elle parle et répondre honnêtement à ses questions.
– Ne pas lui imposer notre propre vision de la souffrance, du sens de la vie, de la spiritualité et de la mort.
– Éviter l’ambiance triste et sinistre.
– L’aider à résoudre tous les problèmes pratiques et administratifs qui peuvent l’angoisser: problèmes de succession, déclaration de revenus, etc.
– Lui permettre de partir, de mourir, quand elle est prête. Ne pas la retenir.
2. Aménagement de l’environnement de fin de vie
– Créer un environnement le plus naturel, le plus convivial, le plus chaleureux et le plus confortable possible.
– Faire en sorte que l’environnement ne ressemble pas à un mouroir et enlever le plus possible les traces du monde médical.
3. Attitude à l’égard de la personne mourante
– Ne pas l’identifier à sa maladie ou la voir comme un simple corps qui doit être soigné.
– La traiter avec respect et dignité, comme une personne normale, entière et vivante.
– Rester totalement naturel avec elle.
– La toucher, lui faire sa toilette, prendre soin de son corps, de ses mains, de ses cheveux, avec affection, respect, douceur, chaleur, calme et tendresse.
– Éviter de bâcler le travail et de le faire avec brusquerie.
– Lui permettre d’exprimer ses besoins.
Les besoins de fin de vie: des désirs à la réalité!
Malheureusement, ces demandes, pourtant bien légitimes, ne sont souvent pas prises en compte ou ne peuvent pas l’être, tant par les familles que par les soignants professionnels
À propos des soignants professionnels, dans ses réflexions sur la question de mourir dans la dignité, l’AREQ (CSQ), L’association des retraités de l’enseignement du Québec nous fait part de ces quelques considérations.
– L’organisation des soins de vie accuse d’importantes lacunes et souffre d’un manque de ressources dans plusieurs régions.
– Il est difficile de répondre adéquatement et rapidement aux besoins des malades qui souhaitent vivre le plus longtemps possible chez eux et de leurs proches.
– Les ressources pour assurer les soins à domicile sont déficientes.
– Les formations en soins palliatifs sont insuffisantes ou carrément inexistantes.
– La majorité des médecins ne s’intéressent pas vraiment à ce type de soins.
– Les psychologues se font rares dans le domaine des soins palliatifs.
Questions sur la fin de vie que vous souhaitez
Pour vous ou pour un de vos proches
– Comment aimeriez-vous que l’on se comporte avec votre dépouille quand vous serez mort?
– Voulez-vous être incinéré? Enterré? Où? Comment? Quel type de cérémonie aimeriez-vous?
– Avez-vous rédigé votre mandat en cas d’inaptitude? Votre testament biologique?
– Qu’aimeriez-vous ajouter à l’énumération des desiderata de fin de vie?
– Comment, et quand, pourriez-vous faire connaître les vôtres à votre entourage?
– Si vous avez déjà accompagné une personne mourante en tant que proche ou bénévole, comment avez-vous agi et réagi? Qu’avez-vous appris?
– En tant que proche aidant ou soignant professionnel dans un service de soins palliatifs, de quelle aide auriez-vous vraiment besoin? Avez-vous fait connaitre vos demandes? Sinon, qu’est-ce qui vous en a empêché?
N’hésitez pas à m’envoyer vos réponses à certaines de ces questions, car, si elles ont suffisamment nombreuses, j’écrirai un article pour mieux faire connaitre encore aux divers organismes ce que sont nos demandes et les faire prendre en considération.
Vous pourriez aimer lire la postface de Cap sur la retraite
La crise de 2020, et après
Dans 25 ans, il y aura sur Terre plus d’aînés que de jeunes. Les baby-boomers auront tous plus de 65 ans et ceux de la première vague seront centenaires ! Ils seront nombreux à réclamer des soins de santé et de fin de vie
Cela vaut la peine de relire ce post-scriptum, aujoud’hui, quelques années après la parution de mon livre en 2020, et avec un certain recul.
Il est un peu long, mais il fait état de ma pensée à propos de la retraite, du vieillissement, de la pandémie de COVID-19, du sort de certains aînés, du fléau de l’âgisme, ainsi que des objectifs du gouvernement du Québec pour les prochaines années. Il est question aussi de la crise du climat et de certaines de nos valeurs qui mériteraient d’être révisées!